Nuit Éternelle remarqua la désinvolture dans les gestes du matou, ainsi que ses yeux qui se posèrent lassement sur le poisson qu'elle venait de pêcher. Sa queue fendit l'air quand il vint le saisir entre ses crocs. L'agacement lui fit presque relever une rangée de croc, comment osait-il se resservir alors qu'il n'avait même pas encore chasser ? Ni une, ni deux, la femelle posa une patte sur la queue frétillante et encore visqueuse du poisson dans la gueule de Renard. Lorsqu'il daigna lui jeter un regard, elle eut un malin plaisir à lui sourire hypocritement et sortit les griffes à quelques centimètres de son museau, enfourchant la proie. Elle s'approcha de l'oreille du matou doré et susurra d'une voix mielleuse.


« Ne fait pas semblant mon bon Renard, railla t-elle, ton intuition poussée à l'égocentrisme ne te l'as pas soufflée ? »

Un sourire en coin s'afficha sur les lèvres de Nuit Éternelle, alors comme ça le beau rouquin aurait succomber à l'idée de l'invité à partager sa proie ? Satisfaite, elle retira ses griffes et le poisson retomba flasquement sur le sol, tête la première. Elle dressa les oreilles, en examinant Renard, s'il veut jouer, nous pouvons se prendre au jeu, facilement et avec plaisir. La femelle sombre se doutait bien qu'elle n'était pas la première que le rouquin charmait, d'ailleurs, beaucoup de la gente féminine n'aurait pas refuser ce tête à tête avec le séducteur, mais cela faisait amèrement rire la lieutenante.
Elle aimait bien jouer.

     « Oh, j'ai bien peur de ne pas être à la hauteur de vos attentes, miaula t-elle d'une petite voix, les yeux doux, ma gente compagnie vous ennuierai au plus haut point. »

Elle rit intérieurement, et sourit. Son regard ambré s'abaissa lentement sur le poisson aux pattes de renard, d'un geste rapide et enfantin, elle le saisit entre ses longes griffes et l'élança dans les airs avant de le rattraper à pleine gueule, se réceptionnant à un brin de moustache du matou plus grand qu'elle. Elle plissa les yeux.

      « En revanche, je garde ça ! Elle sourit, les yeux pétillants, à plus tard ! »

Sans attendre une réponse, la chatte noire fit volte-face et gambada jusqu'au centre de clairière, elle chercha une silhouette du regard, déposant son regard de gauche à droite, haletante sous le poids du poisson. Puis, ses pas l'a dirigèrent instinctivement sous le promontoire, où un matou gris tigré était posté, patte repliées sous le poitrail, la lieutenante déposa son poisson à ses pattes, le pelage toujours trempée à cause de sa chute, elle s'affala au sol, posant sa tête sur ses pattes, pensive. Pelage de Menthe vint lui fourrer le museau contre la joue, elle sourit. 
     « Bon, on l'attaque ce poisson ! Proposa t-il, joyeux. »
Nuit Éternelle acquiesça, l'esprit toujours vaquant à sa discussion avec Renard, fière de sa répartie contre le séducteur, elle n'était pas chatte facile.

Rivière Glacée qui venait de rentrer de chasse, alla déposer le poisson attraper dans le tas de gibier.
Elle remarqua que Renard discutait avec Nuit Éternelle, la lieutenante du Clan de la Rivière.
Rivière Glacée qui prit un autre poisson qui était plus petit que celui qu'elle avait attraper, se dirigeait vers Nuit Éternelle.

« Bonjour, Nuit Éternelle ! On mange ensemble ? » demanda t-elle toute joyeuse d'avoir de la compagnie.

Les yeux touts rond au bord bleus, Rivière Glacée reprit le poisson d'en la gueule, attendant la réponse de Nuit Éternelle. L'odeur délicieuse de l'animal envahit les narines de la guerrière, elle avait si faim ! Son ventre lui, gargouillait en silence.

Nuit Éternelle dégustait son poisson avec appétit, sa chute dans le ruisseau l'avait trempée jusqu'au os, et elle pouvait admettre que cela plus sa chasse lui avait correctement ouvert l'appétit. À ses côtés, Pelage de Menthe demeurait étrangement silencieux, ce n'était guère de son habitude. Le matou au pelage strié de gris et elle étaient amis de longue date, à la pouponnière ensemble, novice durant le même baptême, ils étaient comme qui dirait, complémentaires. 

Tout étaient d'un naturel joyeux et expressifs, quand quelque chose n'allait pas, c'était flagrant et l'un devinait toujours les émotions de l'autre. Pas la peine d'essayer de cacher le moindre secret qui pourrait déteindre sur notre humeur ou nos traits.
La lieutenante dressa les oreilles, une silhouette fit remuer les entrailles de l'entrée du camp, Rivière Glacée en émergea, elle se dirigea près du tas de gibier où Nuit Éternelle avait planté Renard et y déposa un poisson. La guerrière bicolore adressa un geste de tête à la femelle sombre qui lui rendit, puis elle saisit un autre poisson, quoique plus petit et vint accoster la lieutenante et Pelage de Menthe.


     « Bonjour, Nuit Éternelle ! On mange ensemble ? Lui proposa t-elle, toute sourire.
       - Salutations Rivière Glacée. Ma foi, nous serions ravis de manger avec toi, fit Nuit Éternelle en détournant le regard vers son ami d'enfance qui hocha la tête. »


Comme pour lui dire de s'installer, la lieutenante tapota du bout de la queue l'emplacement à côté d'elle, puis elle reporta son attention sur la nouvelle venue.


         « Alors, la chasse a été bonne ? » S'enquit t-elle.

La nouvelle venue ne se le fit pas redire deux fois, elle s'installa non sans saluer Renard au passage, ce qui fit remuer les moustaches de Nuit Éternelle, étrange qu'une chatte se montre si aimable avec le rouquin au caractère bien trempé. Rivière Glacée devait être dotée de bien plus de patience -ou simplement aucune rencontre avec Renard- que la lieutenante.
Nuit Éternelle poussa du bout de la patte le gros poisson vers Pelage de menthe, ils l'entamèrent sans mot dire, la chatte crème finit avant eux et entreprit de faire sa toilette.
Une fois leur festin terminé, le matou au pelage strié de gris lâcha un lourd soupir, repu, de même pour Nuit Éternelle qui s'étira de tout son long.

        « Si on peut dire qu'un seul poisson sa suffit, oui. Aujourd'hui, je n'est pas vu assez de poisson, on dirait que les Bipèdes sont venu prendre nos gibier. J'espère qu'ils s'en aillent si c'est le cas.
           -  Ils n'ont pas intérêt à mettre leurs maudites pattes sur nos terres, gronda Pelage de Menthe.
La guerrière sombre dressa les oreilles attentive.
           - Alors comme ça, ils sont revenus, objecta t-elle, c'est ainsi à chaque saison des feuilles nouvelles, il faut tout de même rester vigilant, on ne sait jamais ce qu'ils peuvent manigancer, ces affreux. Je préviendrai le clan d'être sur leur garde, merci Rivière Glacée.

Nuit Éternelle lui sourit, c'était désormais son devoir de mettre en garde les guerriers du clan, de veiller sur eux et de modeler les patrouilles en conséquence.