Chapitre 1 ; Emily.

Marchant dans la rue, je cherchais désespérément ce banc. Là où je me trouvais quand je n'allais pas bien, qui me rappelait tant de souvenirs, de bonheur. J'y étais toujours, le matin, le midi, le soir même. Juste pour me rappeler ces bons moments passés avec elle, quand elle me tenait sur son cœur, me caressait les cheveux. Je souriais en ces pensées, c'était de si beaux moments, ils n'existeront plus maintenant.
Je m'arrêtais. Il était là, devant moi, à a peine quelques mètres. Un sentiment de bonheur me parcourut le corps, mais régnait encore la solitude. J'avançais lentement, pour aller m'y asseoir avec un certain regret.
Plusieurs gravures se trouvaient dans le bois, des cœurs, des « Toi + Moi ». Je me foutais de tout ça, je voulais juste m'y approcher, et me rasseoir dessus comme avant. J'aurais tellement voulu qu'elle soit encore là, à me consoler quand ça n'allait pas, à me parler en tant que femme. C'était impossible, elle n'était plus là, elle ne viendra plus. Je soupirais, m'asseyant une fois de plus sur ce stupide banc. Je devais tourner la page, elle était partie, pas question de me rabaisser à cause de souvenirs qui n'ont plus aucune importance.
Je me levais avec assurance et tapais du pied. Les gens devaient me prendre pour une folle dingue. Quelle importance ? Je commençais à avancer, pour rentrer chez moi. D'ailleurs, je n'en avais pas l'envie. Voir mon père déprimer sur son canapé à cause de ma fichue mère, ça ne donnait pas envie.
Je m'arrêtais devant une boulangerie, prenant deux  petits gâteaux. J'avais pensé lui faire plaisir avec quelques pâtisseries. Malheureusement, je ne savais pas si ça allait marcher à merveille.
En rentrant dans la maison, j'enlevais mon manteau. Une odeur de poulet se faisait sentir. Est-ce que mon père avait décidé de se relever et de faire de la cuisine ? Si c'était le cas, c'était une bonne nouvelle, une très bonne même. Je m'avançais dans le salon et posais les gâteaux sur la table. L'odeur était de plus en plus forte, et on pouvait même distinguer un côté cramé. Je me mis à courir vers la cuisine, une épaisse fumée noire sortait du four. Je pris et mis le gant en toussotant. Ouvrant le four, je sortis le poulet qui était maintenant noir charbon.
Cela pouvait bien se voir que c'était mon père le cuisinier, ce soir. Je pris un couteau et une fourchette et découpais un morceau de viande brûlé avant le mettre dans la bouche. Je le recrachais aussitôt dans la poubelle et bu un verre d'eau pour éviter de me tuer d'une manière particulièrement atroce.
Je me retournais alors pour me trouver en face de mon père, qui avait fait un effort et c'était habillé d'une étrange manière. Short et chemise hawaïenne. Il était resté tellement longtemps à l'intérieur qu'il ne savait pas que l'on était en hiver ? Très logique.
Quelques secondes plus tard, je m'aperçus de la personne qui se trouvait à côté de celui qui devait être mon père. Un jeune homme grand, blond aux yeux foncés. Il devait avoir mon âge, à peu près..

- Emily, je te présente Luke. Il a eut un problème avec ses parents et on va l'héberger quelques temps..

Rien que le mot « hébergé » me donnait la nausée. Je n'avais aucune envie d'héberger quelqu'un, surtout en ce moment. Mes yeux se posèrent en premier sur les deux gâteaux sur la table, me disant qu'il n'y en aurait pas assez. Puis ils se tournèrent vers le blondinet. Mes sentiments passèrent de la surprise à la colère. Je m'approchais d'un pas rapide vers l'inconnu et, n'attendant pas une seconde de plus, le frappa sur la joue. C'est-à-dire une grosse baffe qui a dut lui faire mal plusieurs minutes.

- T'étais obligé de te pointer chez nous ?

Je courus vers ma chambre, comme une lâche, et claquai la porte. Je me trouvais maintenant dans le noir, avec une folle envie de crier. Tout ça à cause de ma mère ! Si elle était toujours là, je ne serais pas la bonne à tout faire dans cette maison. Je me demandais quand même quel problème il avait eut avec ses parents. Mais, rien qu'en le regardant, je ne l'appréciais pas.

Le lendemain matin.

J'étais dans mon lit, en réfléchissant. J'étais vraiment obligé de me lever ? Je n'en avais pas envie, surtout pour croiser ce Luke. Je soupirais, en regardant le plafond. Il s'incrustait dans notre vie, après la mort de ma mère en plus, c'en était trop. Je ne voulais pas le voir, lui parler, le servir. Je me levais rapidement, les cheveux en pétard. Assisse sur mon lit, je me demandais si mon père allait le prendre rapidement pour le fils qu'il n'avait jamais eut. D'un côté, avoir une fille comme moi ne devait pas être tout les jours facile, d'un autre, je ne voulais pas de lui dans notre maison. Je ne voulais pas faire semblant de l'apprécier pour mon père.
J'ouvris les volets. Un petit soleil se profilait à l'horizon, il n'y avait pas vent. Il faisait bon. En soufflant, je franchis le pas de la porte de ma chambre pour descendre les escaliers calmement et sans bruit. Mon père se trouvait sur le canapé, à regarder la télévision, comme si de rien n'était. Il regardait les informations, ça parlait de Noël. Ah oui, les fêtes.Une période assez difficile pour nous, vu que mon père ne travaillait plus et que je ne trouvais pas de petit boulot. Il y avait les cadeaux, et les repas. Je soupirais à cette pensée, j'offrais un cadeau à mon père, à mes petits cousins qui habitaient aux États-Unis et je n'avais jamais assez d'argent pour m'offrir quelque chose. De toute façon, j'avais l'habitude, et ça ne me gênais pas des plus.
Je me fis vite-fait un chocolat chaud, prenant quelques céréales au passage, et je le bus debout contre la table, en regardant à mon tour les informations. Je me mordis la lèvre à l'annonce d'une femme retrouvée dans un lac, à plusieurs centaines de kilomètres de la ville. Je pensais à ces enfants, son mari peut-être qui allait subir le même choc, la même mélancolie et nostalgie que mon père et moi. Je fermai les yeux à cette pensée, et ma tête se mit à tourner. Je la secouais et ré-ouvris mes yeux, pour voir Luke descendre les escaliers. Il avait les yeux rouges, avait-il pleuré ?D'ailleurs, sa joue était autant rouge. Je me mordis une fois de plus la lèvre à ce souvenir, j'aurais quand même put l'épargner de cette belle baffe. Mais c'était parti tout seule, je n'avais pas pu me contrôler.

« Il y a des céréales dans le placard de droite. Sinon, tu te fais un café. » dis-je d'un ton sec.

Je n'avais pas vraiment apprécié qu'il me traite de gamine,  hier soir. Comment pouvait-il oser ? On allait le nourrir matin, midi et soir, l'héberger à sa guise et il m'insultait ? D'accord, j'y étais peut-être allée un peu fort, mais tout de même !
Je regardais dans sa direction. Enfin de compte, il s'était fait un café. J'espérais qu'il serait raté. Je vins vers mon père qui était mi-allongé sur le divan, et qui regardait encore et toujours les informations. Il était en meilleure forme que la veille, il avait l'air d'avoir bien dormi cette fois-ci.

« Papa, je me disais qu'il faudrait vraiment que je trouve un boulot. On arrivera pas à payer Noël et le jour de l'an si ça continue. »

Mon père avait l'air vraiment de s'en foutre. Il me regarda quelques secondes puis se remit à squatter la télévision comme si de rien n'était. Je soupirais et le regardais d'un ton triste. J'avais l'impression que plus les jours passaient, plus il sombrait. Assis sur le canapé dans cette position, on aurait put croire qu'il allait bien, mais c'était tout le contraire. Il ne travaillait plus, ne cherchait plus, il déprimait. Je devais m'occuper de tout, faire les courses, les repas. Je trouvais quelques fois un travail par-ci par-là, mais il ne durait pas plus de deux jours. Et Luke qui se rajoutait à la tablé.. J'avais le sentiment que je n'allais pas y arriver toute seule. Peut-être que si le nouveau dans la famille s'y mettait, on pouvait se remonter, mais vu les relations entre nous, j'hésitais vraiment à lui demander.
Je mis mes mains dans mon visage, désespérée de voir mon père comme ça et de prier. Je me levais calmement du canapé, je passais devant Luke pour aller laver mon bol. Arrivée à lévier, je me rendis compte avec surprise que mon cher père s'était remis à parler. Des paroles qui ne me firent pas vraiment plaisir.

« Tu iras faire visiter la ville à Luke. »

Pardon ? Il ne pouvait pas y aller seul ? Il existait une carte, au cas où il n'était pas au courant, et la ville n'est pas aussi grande que ça pour qu'il s'y perde. Puis je n'avais pas que ça à faire, je devais partir faire les courses, chercher un boulot, et étudier. C'est vrai, à cause de tout ça, je ne trouvais même plus une minute à moi pour mes études. Mais bon, je commençais également à en avoir l'habitude.

« Ok. » répondis-je simplement.

CHAPITRE 5 ; EMILY.

Nous étions sur la plage, fixant l'océan. L'air matinal était frais et le soleil maintenant haut dans le ciel régnait sur l'horizon. Je clignais des yeux, la plage me faisait penser à une carte postale que l'on achèterait n'importe où. Je voyais encore ma mère marchant pieds nus sur le sable, moi à ses côtés, et mon père heureux assis sur une serviette en train de bronzer. Ce souvenir me fit un instant rire, pour m'abstenir. Rien ne serait pareil maintenant, elle n'était plus là, mon seul parent étant en limite dépression.

« Ca me rappelle mes parents. »

Prise en nostalgie, il n'aurait pas parlé je l'aurais oublié. Il était tellement calme, alors qu'il était loin de sa famille, de ses amis. Comment n'avait-il pas cracké ? A sa place, j'aurais déjà hurler sur la plage, m'arranchant les cheveux en courant. Je devais avouer que j'en avais envie quelques fois, de me lâcher. Pourquoi je ne le faisais pas d'ailleurs ? Je n'aurais pas eut honte, ça c'est sûr. Je me mis à regarder Luke, il était calme, mais avait l'air si malheureux. On pouvait le voir dans ses yeux. Je m'étais renseignée, avais demandée à mon père cette nuit pourquoi il était avec nous. Et je savais maintenant qu'il avait perdu ses parents. Comme moi.

« Ca te passera. Tu mettras un moment, mais je te jure que tout ça te passera. »

Quelle menteuse j'étais. Je disais tout ça, pourtant j'étais toujours au même point. C'était même presque pire qu'il y a deux mois, quand ma mère nous laissa. J'avais de plus en plus cette envie de pleurer et de crier, pourtant, je gardais tout ça pour moi et ne faisait rien. Je laissais ce masque me barrer mes vrais sentiments. Je voulais juste les effacer pour de bon et oublier tout ce qu'il s'était passé jusqu'ici. Mais c'était impossible. Je ne pourrais jamais oublier, et ça ne passera pas, jamais.
Et comme par hasard, au pire moment de ma vie et avec quelqu'un qui s'incrustait depuis à peine hier, je me mis à pleurer. Les larmes coulaient de plus en plus, je n'arrivais même plus à m'arrêter. Je m'asseyais par terre et mis mes mains sur mon visage, essayant de me calmer, de respirer plus lentement. Quelle honte j'avais, je passais pour une faible, contre mon gré, et tout ça à cause de mes stupides parents. Et puis, il y avait Luke qui devait me regarder stupéfait et qui devait se moquer de moi intérieurement. Mais à ma plus grande surprise, il s'asseya à mes côtés. Je ne savais pas quelle tête il faisait, si il se moquait, ou si je lui faisais pitié. Les seules paroles que je pus sortir de ma bouche étaient :

« Ne m'écoutes pas. Ca ne passera jamais. »


Il faisait maintenant nuit, peut-être 1h00 du matin. J'étais dans mon lit, regardais fixement le plafond, les yeux encore rouges. Je ne dormais pas, je préfèrais me soucier de mon cas. Peut-être devrais-je aller voir une Psychologue ? Au lieu de réfléchir sur ça, je me levais de mon lit et franchis la porte, pour me retrouver devant celle de Luke. Peut-être que lui pourra m'écouter ou parler ? Je ne voulais pas dormir, c'était sûr. Je toquais doucement, espérant qu'il m'entende. On commençais à avoir de bons liens tout les deux, tant mieux d'ailleurs. J'ouvris de quelques centimètres la porte.

« Est-ce que je peux entrer ? » demandais-je d'une voix douce.
« J't'en prie. » répondit-il.

Et j'entrais alors dans sa chambre encore vide, sans faire de bruit.